Agnès Binet

Professeur d’accordéon et de Formation Musicale ado-adulte, Chef du chœur ado-adulte du Tricastin


Qu’est-ce qui te tient particulièrement à cœur de transmettre à tes élèves à travers tes cours ?

Tout d’abord, je souhaite promouvoir les différents types de facettes de l’accordéon à travers mon enseignement. Tout le monde le connaît dans la musique populaire et dans l’accompagnement de chansons. Cela marche effectivement très bien avec notre instrument, mais il n’y a pas que ça. C’est un instrument très riche, avec lequel on peut faire toutes sortes de musiques très différentes : des transcriptions de musiques Baroque et Classique de Jean-Sébastien Bach par exemple. En ce moment, dans le projet Haydn, les élèves se rendent comptent que l’on n’a pas besoin de changer une note pour rester très près de la pensée du compositeur. Dans la musique contemporaine, au milieu des années 80, c’est l’instrument qui avait le plus de littérature à son actif.

Ensuite, ce qui est essentiel pour moi, c’est un épanouissement personnel de l’élève à travers la musique. Comme on le sait, chacun a des capacités très différentes et en ce qui me concerne, le résultat importe peu, ce qui compte c’est ce qu’ils apprennent au sens large : c’est d’éveiller, de cultiver leur curiosité quelle que soit la matière, et qu’ensuite cela puisse rester quelque chose de fondamental dans leur vie. L’accordéon est un instrument difficile du point de vue de la motricité : il y a un soufflet et 2 claviers à gérer en même temps, le goût de l’effort est souvent sollicité….

As-tu des compositeurs de musique contemporaine que tu apprécies particulièrement ?

Oui, par exemple dans les pièces pédagogiques : Heikki Valpola. Dans la littérature d’Europe du Nord : Nordheim. On a la chance d’avoir une Séquenza de Bério pour accordéon dont on est très fiers. Elle est relativement souvent donnée car c’est un compositeur très apprécié des mélomanes.

Séquenza de Bério - Origine : Youtube

Qu’est-ce que tes élèves aiment jouer ?

Quand ils sont peu aiguillés sur les différents types de musique qu’ils peuvent jouer, souvent ils me demandent de la musique Classique ou Baroque ou bien des pièces de musiques de l’Est. Ils sont contents de pouvoir jouer des pièces connues qu’ils ont déjà entendues. Pédagogiquement, c’est très intéressant.

Ils jouent rarement des accompagnements de chanson. Ça peut arriver dans le cas d’un projet personnel : quand ils accompagnent un chanteur. A ce moment-là, ils amènent la partition pour que je leur donne des pistes de travail, mais ça reste de l’ordre d’un projet personnel.

Qu’est-ce que tu fais travailler aux débutants ?

Depuis quelques années, il y a vraiment un gros travail sur la pédagogie fondamentale adaptée à l’accordéon avec une démarche extrêmement intéressante des compositeurs. Par exemple, Patrick Busseuil vient de sortir en 6 volumes, 365 pièces pour accordéon intitulées Les jardins d’Handéoline avec des difficultés très progressives. Chaque pièce développe une difficulté différente : l’indépendance des mains, les sauts, les articulations...

Lajos Papp a aussi beaucoup écrit pour accordéon. Les plus jeunes aiment beaucoup l’aspect un peu musique populaire, musique de l’Est. C’est très enjoué et c’est quelque chose qu’ils travaillent bien volontiers. Après, ça emmène facilement vers la musique contemporaine. C’est une grande chance parce qu’il y a 25 ans, on n’avait pas tout ce type de littérature, c’est arrivé dans les années 90.

Vers quel âge peut-on commencer l’accordéon ?

Vers 5 ans. La facture instrumentale de l’accordéon a beaucoup changé. Maintenant, on a vraiment des instruments très adaptés au niveau de la taille et du poids et on a des rendus sonores très intéressants, de belle qualité.

Est-ce qu’il y a des adultes dans ta classe ?

J’ai un tiers d’adultes environ. Souvent, ce sont des gens qui ont appris l’accordéon dans leur jeunesse, qui ont arrêté et qui reprennent. C’est très agréable, car ils ont gardé une certaine technique et on peut découvrir rapidement du répertoire.

Comment choisissent-ils l’accordéon sur lequel ils joueront à la maison ?

J’en discute avec les parents. C’est un petit milieu et peu accessible : il faut orienter les parents vers les bonnes personnes et il y en a peu sur la France entière.

Il y a tout un système de location. C’est comme les violons, il y a plusieurs tailles. Je les fais changer assez souvent d’accordéon, afin qu’ils aient un instrument le plus possible adapté à leur taille. Il n’est pas rare qu’ils changent trois ou quatre fois de taille durant leur cursus.

Qu’est-ce que tu dirais à un élève pour lui donner envie de faire de l’accordéon ?

Ça ne se passe pas comme ça. C’est un instrument coup de cœur. Très souvent les parents amènent leurs enfants et me disent : "Je ne sais pas pourquoi, mais il veut absolument faire de l’accordéon." J’ai la chance en tant que professeur de proposer des cours pour un instrument qui est systématiquement choisi par l’élève.

Quels sont les projets de la classe d’accordéon ?

Il y a eu le projet avec la classe de violoncelle autour de Dutilleux en décembre 2016 et janvier 2017. Et maintenant, nous sommes dans le projet Haydn en lien avec la Messe Brève qui sera donné les 19 et 20 mai 2017.

Quelle est la place de la musique d’ensemble dans tes cours ?

Je fais surtout des petits ensembles : des duos et des trios, dans le but qu’ils soient rapidement responsabilisés dans ce qu’ils doivent faire.

Quels accordéonistes chéris-tu particulièrement ?

Claudio Jacomucci qui était venu donner une masterclass en janvier 2008.

Claudio Jacomucci - Origine : Youtube

Philippe Bourlois qui vient de sortir un disque avec Les Variations Goldberg de Jean-Sébastien Bach

Philippe Bourlois - Origine : Youtube
Philippe Bourlois et Elisabeth Gavalda - Origine : Youtube

En jazz, Vincent Peirani qui a été nommé artiste jazz de l’année 2016

Vincent Peirani et Michel Portal - Origine : Youtube

Veux-tu bien nous parler du festival Bouteille en bretelles ?

J’essaie de développer l’image de l’accordéon à travers un festival qui a lieu bis-annuellement chaque premier week-end de printemps en années paires. En années impaires, c’est seulement sur une journée avec un concert. Cette année ce sera du tango au bandonéon. Le festival tourne autour de l’accordéon et des instruments qui lui sont apparentés. C’est souvent l’occasion pour les élèves du conservatoire de venir se produire dans les scènes ouvertes.

Retrouvez l’univers artistique d’Agnès Binet ici :

Duo Accormezzo Festival Bouteille en Bretelles



Peux-tu nous présenter ton chœur d’ado-adulte ?

Je le dirige depuis 5 ans. Il est ouvert à tous ceux qui ont envie de chanter.
Le répertoire est assez varié. Cette année, nous interprétons entre autres la Messe brève de Haydn. Elle sera jouée les 19 et 20 mai 2017.

Grâce à l’intérêt grandissant pour ce chœur, nous avons dépassé les trente choristes, ce qui permet d’aborder des œuvres plus importantes avec un travail à quatre voix.
A chaque fois que c’est possible, le chœur participe à des projets du conservatoire : l’année dernière, avec le projet de musique italienne Baroque ; l’année précédente, autour de la chanson avec la venue de Christopher Murray. Lors du [50ème anniversaire-article37] du conservatoire nous avons collaboré avec L’ECT et sa chef Maïa Paille. C’était l’occasion d’une rencontre entre les deux chœurs dont nous en avons été très heureuses tant Maïa que moi.

Toutes les générations se côtoient dans le chœur. Pour les ados, cela fait partie de leur cursus car ils valident leur UV de Formation Musicale, et il leur arrive parfois de continuer ensuite sans y être obligés. Certains parents s’inscrivent avec leur enfant. Il n’y a pas besoin d’être déjà inscrit au conservatoire pour venir chanter, tout le monde est le bienvenu.

Qu’est-ce qu’on développe en venant à ton ensemble ?

Le plaisir de chanter !
Et bien sûr un travail d’écoute, être capable de s’intégrer dans un groupe pour obtenir de l’homogénéité sonore, etc. Certains viennent chercher à s’extérioriser un peu plus.

Tu donnes aussi des cours de Formation Musicale pour les ados et les adultes ?

Il y a un cursus de trois années pour les adolescents ou les adultes qui débutent la musique et qui ne sont pas inscrits en musique actuelle. Ça permet qu’ils ne soient pas avec les petits de six ans qui n’apprennent pas avec le même rythme. L’échange entre les ados et les adultes est quelque chose de très riche.
Pour moi, le but au bout de ces trois années, c’est qu’ils sachent se débrouiller avec leur partition, qu’ils aient une approche globale tant sur le plan solfégique qu’analytique et de les ouvrir au répertoire de la musique dite « classique ». Pour ceux qui le souhaitent, au bout de trois ans, ils peuvent passer en cycle II.

Interview réalisée par Julia Fayolle le 09/02/2017





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